Avec son slogan « Make America great again », Donald Trump, fraîchement réinstallé à la Maison Blanche après avoir défait Kamala Harris aux présidentielles de 2024, a lancé une offensive économique d’une ampleur inégalée. L’arme principale de cette reconquête économique : une salve de droits de douane prohibitifs imposés à près de 200 pays, bouleversant ainsi les dynamiques commerciales du monde.
L’annonce a été faite le 2 avril dernier, au jardin sud de la Maison Blanche, où étaient rassemblés journalistes, analystes, représentants du monde des affaires et observateurs financiers. Le message de Trump était clair : restaurer la souveraineté commerciale de l’Amérique, réduire les déficits et rebâtir une économie centrée sur la production domestique.
Mais au-delà du choc médiatique, cette initiative est soutenue par une armature idéologique et même scientifique, selon l’administration américaine. Elle repose sur une « équation de l’équilibre commercial » censée déterminer objectivement les niveaux de taxation douanière à appliquer à chaque pays. Pour Washington, il s’agit d’un rééquilibrage systémique, et non d’une agression commerciale. Pourtant, les conséquences, elles, sont bel et bien systémiques, touchant aussi bien les grandes puissances que les économies fragiles, en Afrique comme ailleurs.
Pourquoi les tarifs douaniers comme armes de l’administration Trump ?
La première question qui vient à l’esprit est la suivante : pourquoi l’administration Trump a-t-elle choisi de relancer une guerre commerciale mondiale, avec tous les risques que cela comporte pour l’économie américaine elle-même ? Selon le Président américain, ces nouveaux droits de douane ont plusieurs objectifs stratégiques :
- Rééquilibrer la balance commerciale américaine,
- Stimuler l’emploi industriel sur le sol américain, et
- Défendre la souveraineté économique nationale
Ces droits de douane sont calibrés selon les déficits bilatéraux des États-Unis avec chaque pays : 20% pour l’UE, 24% pour le Japon, 34% pour la Chine, 26% pour l’Inde, 46% pour la Suisse, etc. L’Afrique n’est pas épargnée : les exportations du Lesotho sont taxées à 50%, celles de Madagascar à 47%, de l’Afrique du Sud à 30% et de la RDC à 22%. Pour Trump, ce protectionnisme assumé est un acte de justice économique.
Conséquences sur les marchés financiers : Un séisme boursier
La réaction des marchés financiers a été aussi brutale qu’immédiate. Le jour suivant l’annonce, le 3 avril 2025, Wall Street a connu l’une de ses plus fortes secousses depuis la crise de 2020. Le S&P 500 a perdu 3,4%, tandis que le Nasdaq 100 plongeait de 4,5%. L’onde de choc s’est propagée aux marchés asiatiques et européens : le DAX allemand reculait de 3,1%, le CAC 40 français de 2,8% et le Nikkei japonais de 3,7%.
La perspective d’un ralentissement du commerce mondial et d’une fragmentation des chaînes d’approvisionnement inquiète les investisseurs. Les entreprises à forte exposition internationale, notamment dans les secteurs de la tech, de l’automobile et de la pharmacie, voient leurs valorisations menacées. L’incertitude règne, et les stratégies de couverture explosent dans les hedge funds. Pendant ce temps, le cours de l’or, considéré comme valeur refuge explose sur les marchés.
Les mathématiques s’invitent sur la table : Justification de l’administration Trump de ces nouveaux tarifs douaniers

Dans une tentative de justification technique, l’administration américaine a publié une équation mathématique définissant les niveaux de taxation par pays. Selon l’USTR (le Représentant au commerce), la formule s’appuie sur le ratio entre le déficit commercial bilatéral et les exportations américaines vers ce pays.
Les critiques fusent. Des économistes du MIT et de la Brookings Institution dénoncent une formule simpliste et dangereuse, qui ignore la complexité des flux de valeur, des services, des co-productions et des externalités positives des importations. « Un monde régi par cette logique tarifaire, c’est un monde en guerre économique perpétuelle », prévient le professeur James Halliday.
La stratégie « Trump » semble fonctionner…
Malgré les controverses, la Maison Blanche revendique déjà des succès. Sur X (anciennement Twitter), le compte officiel de la maison blanche fait mention de la date du 2 avril comme « le jour de la libération économique de l’Amérique ». En effet, l’administration Trump dit avoir enregistré plus de 5.000 milliards de dollars d’investissements étrangers depuis janvier 2025.
Voici quelques chiffres annoncés :
- 700 millions $ de Schneider Electric,
- 500 millions $ de JCB Machines,
- 20 milliards $ de Hyundai,
- 500 milliards $ cumulés de SoftBank, Oracle et OpenAI,
- 100 milliards $ de TSMC,
- 27 milliards $ de Eli Lilly,
- 500 milliards $ d’Apple,
- 55 milliards $ de Johnson & Johnson,
- 25 milliards $ d’ADQ et Energy Capital Partners.
Si ces chiffres sont réels et durablement convertis en création d’emplois, l’impact pourrait être significatif pour le tissu industriel américain.
Quid de l’Afrique ?
Pour le continent africain, ces mesures représentent un véritable choc. Les pays dépendant des exportations vers les États-Unis, comme Madagascar (textile), la RDC (minerais), ou encore le Lesotho, verront leur compétitivité érodée. Les entreprises locales risquent de perdre l’accès à un marché clé, ce qui pourrait menacer des milliers d’emplois.
De plus, l’instabilité sur les marchés financiers entraînera une hausse des primes de risque pour les pays africains. Le coût de la dette souveraine augmentera, freînant les projets d’infrastructure. Enfin, les chocs indirects sur les chaînes de valeur mondiales (notamment les minerais critiques pour les technologies vertes) pèseront sur les recettes publiques.
Le monde se prépare à riposter
Face à ce que beaucoup considèrent comme une attaque frontale contre le système commercial multilatéral, les réactions fusent. La Chine a annoncé des droits de douane de 34% sur les produits américains. Ursula von der Leyen a appelé à des « contre-mesures proportionnées » de l’UE.
Nathan Mambo Kinsengwa, économiste, alerte : « Le monde est en train de glisser vers un système commercial fragmenté, où l’ordre réciproque remplace l’ordre coopératif et le principe de libre-échange. À terme, c’est la croissance mondiale qui en souffrira, et les pays en développement seront les premiers à payer le prix ».
La guerre commerciale lancée par le Président américain Donald Trump, risquerait d’affaiblir les institutions internationales, et enclencher une période de turbulence économique. L’économie mondiale entre dans une nouvelle ère d’incertitudes.